Published 3 janvier 2023 Commentaires 0 Commentaire Par Eric Mabille Tags art religieuxEglise Notre-Dame du SablonFond Baillet-LatourIRPA BruxellesMichiel CoxciepatrimoineRestaurationSablon Un triptyque de Michiel Coxcie restauré par l’IRPA, de retour au Sablon Après deux années de restauration, le triptyque ‘La Résurrection du Christ’ de Michiel Coxcie est de retour à l’Eglise Notre-Dame des Victoires au Sablon, après une étude et restauration approfondie a l’atelier de restauration des peintures de l’IRPA. Le triptyque de Michiel Coxcie Etant pourtant considéré comme une des plus belles œuvres connues en l’église de Notre-Dame des Victoires au Sablon, le triptyque était ‘dans un état lamentable’. Peint en 1592, l’année de sa mort, par Michiel Coxcie – considéré à l’époque comme le Raphaël Flamand – il est bien plus qu’une simple scène religieuse et s’inscrit également dans un contexte tourmenté des guerres de religions dont certains événements funestes furent perpétrés dans l’environnement immédiat de l’église qui l’abrite. Revenu au Sablon, il a été placé dans un endroit plus visible et accessible à tous et toutes. L’œuvre s’en trouve valorisée, bénéficiant de plus de recul pour être appréhendée visuellement. A l’origine, le triptyque de Coxcie fut offert par Charles Quarré et sa première épouse, Anne Taye, dame de Goyck, ainsi que leurs enfants, Jean et Anne. Les panneaux latéraux les représentent en donateurs agenouillés sur un prie-Dieu. L’homme était membre du conseil du Brabant et proche du cruel duc d’Albe. Richissime, il pouvait s’offrir une œuvre de Michiel Coxcie. Michiel Coxcie Artiste important du XVIème siècle, prisé des cours, Michiel Coxcie (1499-1592) était un artiste très actif à Bruxelles, durant une période mouvementée pour l’histoire de la ville. On se souviendra de la très belle rétrospective que le M Museum de Leuven lui avait consacrée en 2013. Au XVIe siècle, Michiel Coxcie est un artiste estimé, chargé de commandes prestigieuses par des personnalités de renom. Il passe une dizaine d’années à Rome, où il étudie l’Antiquité et l’art des maîtres de la Renaissance tels que Raphaël, Michel-Ange et Léonard de Vinci. De retour au pays, Coxcie réalise des pièces d’autel, vitraux et tapisseries pour des clients à Bruxelles, Anvers et Malines. Le point culminant de sa carrière est sa nomination en tant que peintre de cour de Charles Quint et Philippe II. Il exécutera d’ailleurs pour ce dernier une réplique exacte et contemporaine du célèbre ‘Agneau Mystique des Frères Van Eyck. Les contemporains de Coxcie s’inspirent de son style novateur et de ses compositions d’un nouveau genre. Après sa mort, les artistes continuent pendant plusieurs siècles à admirer ses œuvres ; même Pierre Paul Rubens se laisse inspirer par elles. Au fil du temps, Coxcie est progressivement oublié. “La Résurrection du Christ et donateurs” est une grande œuvre par sa taille, un panneau central de 197 cm sur 142,8 cm avec deux volets peints, qui est importante dans la biographie du peintre, mais aussi dans l’évolution des matériaux. La restauration Le triptyque nécessitait une restauration conséquente : le mauvais état de la peinture ne permettait plus de la présenter. Des couleurs étaient décolorées ou très sombres, les traverses bloquées sur le revers du panneau central, de nombreuses campagnes de restauration précédentes, plus ou moins grossières, l’œuvre avait fini par disparaître sous les couches de vernis, les surpeints, les retouches et les vieux mastics qui couvraient une grande partie de la couche picturale originale. Coxcie travaillait avec le smalt, un pigment bleu meilleur marché que l’azurite. Malheureusement, ce verre riche en potassium et en cobalt, broyé pour obtenir cette poudre pigmentaire, était non seulement difficile à travailler, mais, surtout, a tendance à se décolorer. Cette altération était devenue très visible sur les habits des donateurs représentés sur les volets du tableau. La veste du fils avait été trop agressivement nettoyée dans le passé. Lors d’une restauration, la couche de smalt altérée avait été, à tort, interprétée comme un vernis supprimée. Le processus de restauration est réglé comme du papier à musique : à partir de bonnes photos avant restauration, vient l’étape d’imagerie scientifique. La fluorescence dans l’ultraviolet permet de voir les différents vernis et retouches récentes; la photographie l’infrarouge permet de voir le dessin préparatoire sous-jacent exécuté par le peintre avant l’exécution picturale ; la radiographie, permet de voir l’état de conservation du support et de la couche picturale. Enfin, l’examen sous binoculaire plonge le restaurateur dans l’histoire des matériaux. Seulement si nécessaire, des prélèvements sont opérés en vue d’une étude stratigraphique. Après l’étude et l’analyse et avant traitement, viennent les éventuelles consolidations (là où il y a des soulèvements des couches) et le travail sur le bois, pour consolider, stabiliser et éviter les tensions du support pictural. Ensuite seulement commencent les tests de nettoyage, exécutés avec des solvants couche par couche pour arriver, si possible, progressivement à l’original. Un processus précis, patient, long et variable en fonction des zones du tableau. Deux ans, sous la supervision du responsable de l’atelier de peintures, Livia Depuydt-Elbaum, ont été nécessaires pour entreprendre cette restauration. Une restauration est à chaque étape, un travail d’équipe associant une vaste de gamme de spécialités et de compétences complémentaires. L’œuvre a désormais retrouvé toutes ses valeurs artistiques, iconographiques, technologiques, historiques. Ce n’est pas la première fois que l’IRPA participe aux restaurations pour cette église. L’Institut Royal Patrimoine Artistique a été très étroitement impliqué dans la restauration de la chapelle Saint-Marcou, l’une des deux chapelles offertes par la famille de la Tour et Tassis. Aujourd’hui, il restaure l’autre chapelle, Sainte-Ursule. L’Institut s’est chargé de l’étude préalable. Il a également restauré le magnifique antependium, c’est-à-dire ce qu’on pend devant l’autel, datant du 17e, en fils d’or et d’argent. Sans oublier le chœur de l’église, ses peintures murales et les écoinçons. La conservation-restauration du triptyque de Michiel Coxcie à bénéficié du soutien financier de la Région Bruxelloise (75%) et du Fond Baillet Latour (25%). Le Fonds des amis de l’église Notre-Dame du Sablon a pris en charge les coûts de déménagement, d’accrochage et d’éclairage. L’église est ouverte tous les jours et accueille un demi-million de visiteurs par an, dont beaucoup de touristes. C’est aujourd’hui l’un des dix monuments les plus visités à Bruxelles, avec plus d’un demi-million de visiteurs par an. Michiel Coxcie La Résurrection du Christ & Donateurs Eglise Notre-Dame des Victoires Rue des Sablons 1000 Bruxelles Lundi-vendredi de 10h00 à 18h00 Samedi-dimanche de 9h00 à 18h00 https://www.fondsamiseglisesablon.be/ Restauration par l’Institut Royal du Patrimoine Artistique /IRPA Bruxelles https://www.kikirpa.be/fr/ Michiel Coxcie, Résurrection du Christ et Donateurs, détail main, Eglise Notre-Dame des Victoires au Sablon, (c) photo courtesy IRPA Bruxelles, Boombartstic Art Magazine, Bruxelles Michiel Coxcie, Résurrection du Christ et Donateurs, vue d’une restauration par l’IRPA Bruxelles, Eglise Notre-Dame du Sablon, (c) photo courtesy IRPA Bruxelles, Boombartstic Art Magazine Michiel Coxcie, triptyque La résurrection du Christ et Donateurs, panneau central avant restauration par l’IRPA Bruxelles, Eglise Notre-Dame des Victoires au Sablon, Bruxelles, (c) photo courtesy IRPA Bruxelles, Boombartstic Art Magazine Michiel Coxcie, triptyque La Résurrection du Christ et Donateurs, panneau central après restauration par l’IRPA Bruxelles, Eglise Notre-Dame des Victoires au Sablon, Bruxelles, (c) photo courtesy IRPA Bruxelles, Boombartstic Art Magazine Michiel Coxcie, triptyque La Résurrection du Christ et Donateurs, vue de l’arrière avec grisailles, restauration IRPA Bruxelles, Eglise Notre-Dame des Victoires au Sablon, Bruxelles, (c) photo courtesy IRPA Bruxelles, Boombartstic Art Magazine Michiel Coxcie, triptyque La Résurrection du Christ et Donateurs, tableaux restaurés par l’IRPA Bruxelles, Eglise Notre-Dame des Victoires au Sablon, Bruxelles, (c) photo courtesy IRPA Bruxelles, Boombartstic Art Magazine Auteur Eric Mabille "J’adore bouger et mon rapport à l’art est dans le mouvement, l’instinct et l’instant et ce depuis toujours. J'aime ce côté spontané, libéré de toute connaissance préalable, en vrai autodidacte. J’apprécie aussi pleinement le moment privilégié d’une preview presse, où seul dans une salle d’exposition, j’ai cette impression d’avoir toutes les œuvres pour moi. » Eric Mabille est diplômé en marketing, passionné de web, spécialisé en gestion de projets culturels et en marketing de destination et de niche. Il fréquente depuis plusieurs années l’atelier de dessin et les cours de chant lyrique à l’Académie de Saint-Gilles.