Published 15 juillet 2017 Commentaires 0 Commentaire Par Eric Mabille Tags abstractionArchitectureChen Ting-ShihChineChu Teh-ChunChu Wei-BorChu Wu-ShunChuang LeeChun Kwang YoungFong Chung-RayFrom China to Taiwangroupe Fifth Moongroupe Ton Fangroupe WuyeuHangzhouHo KanHsu WeiIxellesLee Chun-ShanLiao Chi-ChunLiu Kuo-SungMusée d'IxellespeintureRichard LinSabine VazieuxTaipeiTaiwanTsai Hsia-LingZao Wou-Ki From China to Taïwan, fusions abstraites From China to Taïwan : 80 œuvres d’exception en provenance d’Asie et d’Europe, 16 avant-gardistes de l’Abstraction chinoise rassemblés pour une rétrospective européenne inédite au Musée d’Ixelles jusqu’au 24 septembre 2017. Dans les années 50, des artistes chinois se sont penchés sur une manière de moderniser leur peinture tout en lui conservant ses racines, issues d’une tradition séculaire. C’est aussi l’époque de grandes mutations dans le monde de l’art occidental. De nouveaux langages esthétiques naissent. Les temps d’après-guerre sont propices aux échanges. A l’époque de New York, des artistes occidentaux commencent à regarder vers l’Orient et principalement vers la calligraphie qu’ils qualifient d’abstraction alors qu’elle demeure pour les orientaux chargée de sens. Les artistes orientaux les rejoignent dans leur démarche en regardant, eux, vers l’Occident, en quête d’une certaine forme de modernité. Ils s’essayent à une synthèse esthétique qui consiste à comprendre la calligraphie à travers la gestuelle intuitive. L’exposition En tout 16 pionniers de l’Abstraction chinoise se retrouvent réunis dans cette rétrospective inédite. Des œuvres séduisantes, immersives, méditatives, simplifiées à l’extrême, diluées ou agitées de vivacité. On passe ici par tous les ressentis et les sentiments tant la diversité des expressions est grande. C’est aussi l’histoire d’un formidable récit, d’une épopée des temps modernes, où des artistes chinois contraints de quitter leur pays natal, trouvent refuge à Taïwan dès 1949 et se tournent vers le Nouveau Monde. Une page de l’histoire de l’art méconnue en Europe et en Amérique. Placée sous le commissariat de Sabine Vazieux , spécialiste en peinture abstraite d’après-guerre en Europe, cette exposition est le témoignage de l’émergence d’une modernité picturale. Un contexte historique Dans La Chine traditionnelle des années 30, à l’Ecole des Beaux-Arts de Hangzhou, l’enseignement des arts est dispensé par certains professeurs qui se sont formés à l’art occidental en Europe. S’y retrouvent trois pionniers de l’art abstrait chinois, Zao Wou-Ki (1920-2013), Chu Teh-Chun (1920-2014) – qui y étudient puis y enseignent – et. Lee Chun-Shan (1912-1984) – qui y enseigne de 1937 à 1946. Dès 1949, après huit années d’occupation japonaise (1937-1945), Mao Zedong accède au pouvoir et provoque l’exode d’un million de Chinois vers Taiwan – qui passe sous protectorat américain l’année suivante. Les artistes chinois exilés découvrent l’art moderne occidental à travers de nombreux ouvrages d’art présents à la Bibliothèque de Taipei. Alors que le régime politique de Chang Kai-Chek exhorte à faire perdurer un art traditionnel, de jeunes peintres refusent ce conservatisme. Et c’est dans ce contexte que naissent les deux plus importants mouvements d’avant-garde taïwanais : le groupe Ton fan et le groupe Wuyeu ou Fifth Moon. Le groupe Ton Fan (1956-1971) Fondé part huit élèves de Lee Chun-Shan, son nom signifie orient en chinois. Ayant la volonté de s’éloigner de la culture orientale, il s’engage dès le début sur les voies de l’abstraction. Fortement influencés par l’Europe, ces artistes intrépides, vont exposer à Stuttgart et Turin notamment mais également à New York. Ils inviteront également des artistes européens comme Lucio Fontana, François Morellet, Piero Manzoni, Antoni Tapiès à venir exposer à Taipei. Le chef de file du groupe est le peintre Lee Chun-Shan. Jeune enseignant à l’Ecole nationale des Beaux-Arts de Hangzhou, il défendra une abstraction née de l’imagerie mentale et du subconscient, qu’il qualifiera d’abstraction surréaliste. Le groupe Wuyeu ou Fifth Moon (1957-1972) Ce groupe expose dès mai 1957 – Wuyeu signifiant mai en chinois – à Taipei sous l’impulsion de Liao Chi-Chun et rassemble six de ses élèves du département des arts de l’Université Provinciale de Taïwan. Leur nom s’anglicise pour devenir Fifth Moon par la suite. Ses artistes s’y retrouvent régulièrement en réunions amicales et expose une fois par an, au mois de mai. Ce groupe s’engage exclusivement sur le chemin de l’abstraction dès 1959. Viennent ensuite de nombreuses publications en vue de théoriser leur art et de provoquer le débat. L’acceptation de l’abstraction Si l’abstraction devient vite le terrain d’expérimentation pour tous ces artistes, les philosophies bouddhiste et taoïste restent au cœur de leur démarche. Quand certains rejoignent le Bouddhisme par une simplification, une épure pouvant aller jusqu’au minimalisme, d’autres prennent le parti de l’évocation de la nature par l’utilisation d’un minimum de couleurs et de formes. L’acceptation de l’abstraction est au cœur de l’art chinois et un des fondements de son esthétique. Peindre c’est créer une impression, une extrapolation dont la qualité dépend de la capacité de l’artiste à saisir l’instant, l’essence de l’image, et à susciter l’émotion chez l’observateur. Dans l’art oriental, la nature peut-être exprimée par touches de couleurs et mouvements libérés des contraintes. L’abstraction n’est d’ailleurs pas nouvelle en Chine, elle existait déjà au XVI ème siècle dans les tableaux de Hsu Wei. 16 artistes de l’avant-garde chinoise Certains convoquent le paysage. Zao Wou-Ki nous exprime l’invisible et les fluides qui l’animent dans une très belle synthèse du paysage traditionnel chinois et l’art contemporain abstrait occidental. Sur les grands formats de Chuang Lee, des terres grandioses sur lesquelles passent les saisons ; une harmonie jaillie du chaos, entre joie et mélancolie. Certains en dépeignent la vitalité. Tsai Hsia-Ling pratique l’encre avec énergie, tel le reflet d’un monde en perpétuel mouvement. L’approche de Hsiao Ming-Hsien semble être rythmée par la musique. Chu Teh-Chun, quant à lui, nous livre une nature simplifiée, presque cosmique pris dans une fulgurance des gestes et des couleurs. Certains expérimentent. Hu Chi-Chung introduit le sable dans ses huiles et le mélange dans ses paysages oniriques à des couleurs flamboyantes, des disques solaires et des formes terrestres. Chen Ting-Shih travaille la linogravure et laisse apparaître les craquelures et les imperfections déposées sur papier entre de grandes formes abstraites. Ho Kan s’oriente vers l’abstraction géométrique, traçant de petites lignes et des évocations de sinogrammes en apesanteur dans l’espace pictural. Liu Kuo-Sung invente un papier composé de deux couches de fibres de coton sur lequel il applique l’encre. En arrachant par endroits des fibres de la première couche, il laisse apparaître des zones blanches dans ses compositions. Certains choisissent l’abstraction radicale Par son approche du temps et de ses effets sur la matière, Fong Chung –Ray dépasse toute représentation formelle de la nature pour en exprimer l’essence spirituelle. Chu Wei-Bor /Chu Wu-Shun réalise des compositions faites de collages noirs et blancs, et de découpages ajourés dans la mouvance du Spatialisme. Peu à peu le geste se calme, s’atténue pour ne laisser que sa disparition, l’immobilité et le silence Richard Lin affirme sa prédilection pour les lignes pures dans un esprit proche du Bauhaus – et la vibration hypnotique vibration des blancs. Qu’en penser? Avec la rétrospective From China to Taïwan, le Musée d’Ixelles continue son exploration de l’art asiatique après Shunga, estampes érotiques japonaises en 1989, Zao Wou-Ki en 2001 et Gao Xingjian en 2015. Dans un contexte de dictature et de traditions fortement ancrées, des artistes ont choisi la voie du dialogue et imposent avec force des œuvres métissées qui s’exprime comme une superbe synthèse des esthétiques au croisement des cultures occidentale et asiatique Ces artistes, en prenant le risque de la rupture et de la transgression, ont contribué au renouveau de la peinture chinoise au XXème siècle tout en nourrissant la nôtre. From China to Taïwan Musée d’Ixelles 71 rue Jean Van Volsem 1050 Ixelles Jusqu’au 24 septembre Du mardi au dimanche de 9h30 à 17h www.museedixelles.be Chu Teh-Chun, sans titre, 1965, Collection particulière, (c) SABAM, 2017 Chuang Che, Sans titre, 1984, Collection particulière, (c) Chuang Che Chen Ting-Shih, Day and Night, s.d., Estampe, Musée National des Beaux – Arts de Taiwan, (c) Chen Ting-Shih Modern Art Foundation Hisao Chin, Red Cloud, 1985, Encre sur papier, Collection particulière, (c) Hsiao Chin International Art Foundation Hu Chi-Chung, Sans titre, 1960, Huile et sable sur toile, Collection particulière, (c) atelier Hu Chi-Chung Liu Kuo-Sung, It’ll soon Be White All Over, Moon Series, 1970, Collection particulière, (c) Liu Kuo Sung Lee Chun-Shan, Sans Titre, 1970, Musée National des Beaux – Arts de Taiwan, (c) Lee Chun-Shan Foundation Chu Wei-Bor, Newly Born, 1985, Acrylique sur toile, Collection particulière, (c) Chu Wei-Bor Zao Wou-Ki, Nous Deux, 1955, Huile sur toile, (c) SABAM, 2017 Richard Lin, Black and Vermillion,1969, Huile et aluminium sur toile, Collection particulière, (c) Famille de Richard Lin Fong Chung-Ray, Sans Titre, 1964, Encre sur papier, Collection particulière, (c) Fong Chung-Ray Enregistrer Enregistrer Enregistrer Enregistrer Enregistrer Enregistrer Enregistrer Auteur Eric Mabille "J’adore bouger et mon rapport à l’art est dans le mouvement, l’instinct et l’instant et ce depuis toujours. J'aime ce côté spontané, libéré de toute connaissance préalable, en vrai autodidacte. J’apprécie aussi pleinement le moment privilégié d’une preview presse, où seul dans une salle d’exposition, j’ai cette impression d’avoir toutes les œuvres pour moi. » Eric Mabille est diplômé en marketing, passionné de web, spécialisé en gestion de projets culturels et en marketing de destination et de niche. Il fréquente depuis plusieurs années l’atelier de dessin et les cours de chant lyrique à l’Académie de Saint-Gilles.